Numéro 2, 2002
Éditorial de Marie-France Verdier,
directrice de la publication
« Au cours de lhistoire » écrivait Hannah Arendt, dans La crise de la culture, « les chercheurs et les diseurs de vérité ont toujours été conscients des risques quils couraient ».
Or, ceux qui chantent à lunisson les vertus du communautarisme décrit comme lessence même de la modernité paraissent ne courir aucun risque, sinon peut-être celui de commencer à lasser un public à qui on impose une nouvelle forme de normalité.
Ils connaissent la musique et savent très
bien la diffuser en jetant lanathème sur leurs adversaires voués
aux gémonies au nom dune prétendue remise en cause du pieux
consensus du respect des différences.
Dès lors, les hommes politiques sont incités à pincer la
même corde et flattent en termes électoralistes les passions communautaristes
et ethnicistes.
Le dispositif est simple ; sa grossièreté et son efficacité sont terrifiantes ; cest politiquement correct. Autant dire quavec un tel acharnement, nous baignons en pleine propagande et dans un manichéisme de pacotille.
En effet, dun côté, à
la faveur dune balkanisation généralisée sur la base
didentités ethnico-religieuses, linguistiques, sociales, génétiques,
morphologiques ou sexuelles, les bons, les héros du multiculturalisme.
Dun autre côté, les monstres, les chantres de la régression.
Pourtant, la radicalisation dun certain communautarisme peut encourager
de dangereux réflexes identitaires voire le « clanisme »
et même lémergence dun extrémisme groupusculaire
victime de ses propres radicalités.
Les différentes contributions dans ce numéro ne constituent évidemment
pas un quelconque manifeste mais permettent de nous éclairer, par divers
points de vue, sur les communautés et le communautarisme et peut-être
de nous convaincre quil ne sagit pas de déchirer la société
pour que demain nous laisse encore une lueur despoir.